GFA - Administrateur ad hoc - Confidentialité

Bail rural de 25 ans consenti par GFA - Statuts - Majorité - Congé.-

Une décision récente de la Cour d’Aix en Provence précise divers points de contentieux susceptibles d’apparaître en fin de bail à long terme consenti par un GFA.

La confidentialité

L’article L. 611-15 du code de commerce dispose que toute personne qui est appelée à la procédure de conciliation ou à un mandat ad hoc ou qui, par ses fonctions, en a connaissance est tenue à la confidentialité. Il y a donc lieu de supprimer des conclusions des appelants les passages, notamment aux pages 13 et 14, relatant les initiatives du mandataire ad hoc, ou la teneur de ses comptes rendus, et d’écarter des débats les pièces  qui ont trait aux conditions d’instauration de la procédure de mandat ad hoc et à son déroulement.

Le congé

Le bail à ferme à long terme, de 25 ans, dont la cession de G… à son fils A… a été autorisée par un jugement du tribunal paritaire des baux ruraux de Brignoles en date du 9 février 2009 confirmé en appel, est venu à expiration le 23 juillet 2001 sans qu’un congé ait été délivré pour cette date par le GFA …; il a été expressément convenu dans l’acte notarié du 23 juillet 1976, page 5, qu’à défaut de congé délivré quatre ans avant la fin du bail par acte extra-judiciaire, celui-ci se renouvellera par tacite reconduction, sans limitation de durée, que toutefois, chacune des parties pourra y mettre fin chaque année, par acte extra-judiciaire, qu’en ce cas, le congé prendra effet à l’expiration de la quatrième année suivant celle au cours de laquelle il aura été donné et qu’en cas de congé donné par le bailleur, celui-ci ne sera pas tenu de remplir  les conditions énoncées à la section IV du chapitre II du titre premier du livre sixième du code rural ; en vertu de cette stipulation contractuelle, conforme à l’article L. 416-3 du code rural et de la pêche maritime, le bail, ainsi venu à expiration le 23 juillet 2001, s’est ensuite renouvelé par tacite reconduction, sans limitation de durée à compter de cette date, en sorte que le congé délivré le 7 janvier 2014 l’a été valablement pour le 31 décembre 2018, soit à l’expiration de la quatrième année suivant la date de sa délivrance.

Les majorités requises et les erreurs matérielles

L’article 16 des statuts du GFA… est ainsi rédigé : « Le gérant jouit des pouvoirs d’usage pour agir au nom de la société et faire et autoriser les actes et opérations relatives à son objet. Il a spécialement les pouvoirs suivants : Il administre les biens de la société et la représente vis-à-vis des tiers et de toutes administrations. Il effectuera tous travaux de réparation et d’entretien, arrêteront à cet effet tous devis et marchés. Mais tous de travaux de construction ou de reconstruction ou d’amélioration, ou d’aménagement des bâtiments et des terres, toutes opérations d’acquisition, d’aliénation ou d’échange, quelles qu’elles soient et sous quelque forme qu’elles soient réalisées et tout emprunt par la société, même consenti par un associé et quel qu’en soit le montant, nécessiteront le concours et l’approbation de l’assemblée générale extraordinaire des associés. Il en sera de même pour tous baux ou locations à conclure ou à réaliser. (…) » Le verbe « réaliser » ainsi utilisé ne produit aucun effet si, comme le soutiennent le GFA … et Mme …, il doit être considéré comme un synonyme de « conclure » également employé dans la phrase ; le terme « réaliser » est donc le résultat d’une erreur de rédaction et doit être entendu comme signifiant « résilier », le sens qu’il y a lieu de donner à ce terme étant conforme à la commune intention des parties signataires des statuts, qui était de conférer à l’assemblée générale extraordinaire, seule habilitée à autoriser la conclusion des baux ou locations, le pouvoir d’en approuver parallèlement la résiliation ; c’est donc par une interprétation exclusive de dénaturation que le premier juge, se fondant sur les dispositions des articles 1156 à 1158 du code civil, a estimé que le terme « réaliser » devait être pris comme signifiant « résilier ». Il convient d’ajouter que l’article 16 des statuts se trouve affecté d’autres erreurs de rédaction  (Il…arrêteront à cet effet tous devis et marchés … Mais tous de travaux de …) et qu’il est extrait de statuts-type utilisés par la SCP S… et associés, titulaire d’un office notarial à… et rédacteur des statuts du GFA … sachant que les statuts d’un autre GFA… que communiquent les intimés, contient la reproduction in extenso de cet article 16 avec les mêmes erreurs de rédaction ;

Le principe d’Estoppel et le dépassement de pouvoir du co-gérant

 les appelants ne sauraient se prévaloir du principe selon lequel une partie ne peut se contredire au détriment d’autrui (théorie de l’Estoppel) en invoquant l’initiative prise  de résilier, par lettre du 15 décembre 2015, en sa qualité de co-gérant du GFA … et hors toute autorisation de l’assemblée générale extraordinaire, le bail consenti par le GFA à une société de chasse, alors que l’acte ainsi accompli, consistant en un congé avec refus de renouvellement, intéresse une autre convention que le bail à ferme, objet du présent litige, conclu avec un tiers, non associé du GFA. La clause de l’article 16 des statuts ainsi interprétée a pour effet de limiter les pouvoirs du gérant qui ne peut, sans l’approbation de l’assemblée générale extraordinaire des associés du GFA, résilier les baux ou locations ; l’article 1849, alinéa 3, du code civil, applicable à un groupement foncier agricole en vertu de l’article L. 322-1 du code rural et de la pêche maritime, dispose que les clauses statutaires limitant les pouvoirs des gérants sont inopposables aux tiers, que ne peuvent dès lors s’en prévaloir qu’ils en aient eu ou non connaissance ; pour autant, le fermier à qui le congé aux fins de reprise a été délivré par acte du 7 janvier 2014, emportant résiliation du bail à ferme pour le 31 décembre 2018, ne peut, en l’occurrence, être considéré comme un tiers, auquel la clause statutaire serait inopposable ; en tant qu’associé du GFA, titulaire de 250 parts en nue-propriété, il apparaît, en effet, fondé, dans ses rapports avec le GFA, à se prévaloir du dépassement de ses pouvoirs par Mme…, dont il n’est pas discuté qu’elle a délivré seule, en sa qualité de co-gérante du GFA, le congé litigieux.

 C’est donc à juste titre que le premier juge a annulé le congé délivré le 7 janvier 2014 par Mme…, qui n’avait pas le pouvoir d’accomplir seule un tel acte, lequel nécessitait, conformément à l’article 16 des statuts, dont le fermier associé pouvait se prévaloir, l’approbation de l’assemblée générale extraordinaire ; le jugement entrepris doit dès lors être confirmé …(CA Aix en Provence, 4° ch. A, 27 octobre 2016, n° 15-18248).