Notion de fonds riverain d’un chemin d’exploitation

 

« La constitution d’une servitude de passage à travers un fonds riverain du chemin est  insuffisante »

Selon le tribunal, l’impasse en cause n’a pour unique usage que l’exploitation des fonds des demandeurs et des autres riverains. En effet, elle n’a aucune autre utilité en ce qu’elle ne permet pas de relier plusieurs voies publiques ou même chemins entre eux et en ce qu’elle ne permet pas plus d’accéder à autre chose qu’aux seuls fonds des riverains. A cet égard, l’argument tiré du fait que ce chemin soit, in fine et indirectement relié à la voie publique n’exclut pas qu’il s’agisse d’un chemin d’exploitation. En effet, pour pouvoir, exploiter les fonds, conformément à la loi, il est le plus souvent nécessaire de permettre un accès à la voie publique. Cet accès n’est donc pas exclusif de la qualification de chemin d’exploitation. Dès lors, c’est à tort qu’est dénié cette qualification au chemin en cause. Il n’est du reste pas proposé de qualification alternative recevable. En effet, la servitude proposée à demi-mot n’est en rien démontrée….

…Le régime  juridique des sentiers d'exploitation n'est plus l'indivision depuis la loi du 26 août 1881. La loi prévoit que, faute de titre contraire le chemin d’exploitation est « présumé appartenir aux propriétaires riverains, chacun en droit soi, mais l'usage en est commun à tous ».

…Il en résulte que, sauf accord contraire unanime des riverains, ils sont seuls à y avoir accès.

…Un riverain se définit comme celui ou celle  « qui habite le long d’une rue, à la lisière d’un bois, le long d’une voie de communication, près d’un aéroport »… Le fait d’avoir cédé la seule parcelle riveraine d’un chemin a pour conséquence la perte de la qualité de riverain. Par ailleurs, le démembrement  de propriété que constitue une servitude de passage ne permet pas à celui qui en bénéficie d’obtenir la qualité de riverain, le droit de passage n’emportant pas droit d’habiter, lié à la qualité de riverain.

… En l’état du désaccord de plusieurs des riverains, il y lieu d’interdire le passage de B.., non riverain, sur le chemin d’exploitation en cause. Toutefois, rien n’empêchant un accord unanime entre les riverains ultérieur, cette interdiction se fera sous réserve d’un éventuel accord en ce sens. Pour cette raison, au vu d’un possible enclavement des parcelles de B., en l’absence d’allégations de violation probable de cette interdiction, et surtout dans le souci de préserver les relations de bon voisinage entre les parties, la demande visant à voir assortir cette interdiction d’une astreinte sera rejetée en l’état.

(TGI Marseille  11 Décembre 2018, N° 16/07098- inédit).

Obs.- Cette intéressante décision du tribunal de Marseille donne l’occasion de rappeler la notion et le régime  du chemin d’exploitation qui constitue une véritable voie de desserte privée, souvent même urbanisée. Les bénéficiaires sont exclusivement les riverains du chemin et le propriétaire du fonds auquel il aboutit, c’est-à-dire le fonds dit « terminus ».

Le tribunal rappelle que la constitution d’une servitude de passage sur l’un des fonds riverains ne permet pas à un propriétaire de fonds dominant d’acquérir la qualité de riverain bénéficiaire de l’accès. En cas d’enclave seulement, un accès peut être aménagé de cette façon sous le contrôle du tribunal (voir « Guide des chemins ruiraux et chemins d’exploitation » Edilaix, Point de droit, 6° éd. 2018, n° N137, p.96)